Au début de l’été : Privacy et publicités
Apple a annoncé début juillet de nouvelles fonctionnalités de confidentialités pour les utilisateurs. Ces nouveautés, qui devaient arriver avec iOS 14, se traduiront notamment par les limitations des fonctionnalités de suivis par l’IDFA (Identifier for Advertisers).
Cet identifiant publicitaire permet de récolter des données identifiées et ainsi de suivre les actions de l'utilisateur au niveau de l'appareil. C'est l’identifiant qui est notamment utilisé pour faire du suivi cross-app qui en fait le pilier de l’attribution sur mobile. Autrement dit c'est un indispensable pour les solutions publicitaires mobile.
Avec iOS 14, il faudra désormais un opt-in de l’utilisateur pour activer le suivi via l’IDFA. Pour le suivi de l'attribution c'est l’API SKAdNetwork fourni par Apple qui devrait permettre de faire le suivi des données agrégées de manière anonyme. Les enjeux d’attributions seront donc profondément modifiés suite à la mise en place de cette mise à jour.
L’annonce a déclenché un cataclysme dans l’univers mobile et de la publicité. Facebook a annoncé que des répercussions seront à prévoir pour les annonceurs sur Facebook Ads. Apple a proposé début septembre un report de cette mise à jour, le temps pour les applications et l’écosystème de s’adapter et de faire les modifications nécessaires.
L’attaque organisée par Fortnite au mois d’août
Epic Games, l'éditeur du jeu Fortnite, a décidé d’échapper à la commission de 30% de l’App Store et du Google Play Store en dirigeant les joueurs directement vers son site pour le paiement depuis les applications mobile.
Ce n'est pas la première fois que Fortnite tente de se passer des magasins d'application. Pour le lancement sur Android, ils ont tenté, sans grand succès, de se passer du Google Play Store pour distribuer l’application.
Aussitôt exclu des stores par Apple et Google pour non-respect des règles de fonctionnement, Epic Games avait préparé la riposte qui s’est alors traduit par un dépôt de plainte pour abus de position dominante contre Apple. D’autres munitions de communication ont alors été utilisées avec par exemple le détournement de la célèbre publicité d’Apple 1984, l’utilisation du hashtag #FreeFortnite et l’organisation dans le jeu d’une coupe du même nom.
Pour libérer Fortnite de l'hégémonie d’Apple, l'éditeur a donc lancé un appel à sa communauté de joueurs pour défendre les intérêts financiers de l'éditeur de Fortnite et prendre part au combat.
Ces mêmes joueurs ne peuvent plus jouer aux dernières mises à jour du jeu sorties depuis, suite à l’expulsion par Apple et Google des stores. Une bataille juridique risquée pour Fortnite qui pourrait perdre des joueurs et subir des pertes de revenus même si le jeu est cross-plateforme et cross-play.
Epic Games : un éditeur, un studio et un store de jeux
L'éditeur de jeu vidéo se positionne aussi sur la distribution de jeux avec son Epic Games Store. Ce store en ligne a pour ambition de concurrencer les acteurs en place comme Steam.
En tant que distributeur, Epic Games fonctionne également avec une commission qui est ajustée selon l’utilisation ou non d’Unreal Engine, le moteur 3D temps réel propriétaire développé par Epic Games.
« Conservez 88% des recettes de vos jeux au lieu de 70%. Si votre jeu utilise l'Unreal Engine, Epic prend à sa charge les royalties du moteur des recettes de l'Epic Games Store.» peut-on lire sur le site de l’intéressé.
70 / 30 : la remise en question du modèle de l’App Store
Des résultats et l’abus de position dominante
Apple a annoncé en juin que l'écosystème App Store a généré 519 milliards de dollars dans le monde sur l’année 2019. Les critiques et les attaques se sont alors (peut être) amplifiées.
La répartition des revenus générés par une application mobile, qui est forcément distribué sur l’App Store pour être présent sur les iPhone et iPad, c’est : 70% pour le développeur et 30% pour Apple que ce soit pour les achats in-app, les abonnements ou les applications payantes.
Sous le feu des projecteurs et avant l’audition face aux députés aux États-Unis, Apple a publié une étude sur le modèle commercial de son App Store. Sans grande surprise, le modèle d’Apple est celui utilisé par un grand nombre de plateformes et il est quasiment identique à celui de son concurrent direct le Play Store de Google. La position dominante et la part de marché conséquente d’Apple créent des frictions supplémentaires.
Two-sided markets : l’offre, la demande et l’intermédiaire structurel
Le fonctionnement de l’App Store est caractéristique des marchés bifaces, ou two-sided markets. L’App Store structure le marché des applications mobile pour faire interagir les développeurs d’applications avec les utilisateurs. Comme le font des acteurs sur d’autres marchés, tels Uber, Airbnb, Deliveroo, etc.
Comme l’a rappelé Apple dans une déclaration : « Epic a des applications sur l'App Store depuis une décennie, et a bénéficié de l'écosystème de l'App Store - y compris pour ses outils, ses tests et la distribution qu'Apple fournit à tous les développeurs. »
Les magasins d’applications fournissent aux développeurs un écosystème via une plateforme complète et intégrée pour héberger, distribuer, tester, gérer les téléchargements, envoyer des notifications, gérer les paiements, suivre les usages des utilisateurs… Pour les utilisateurs c’est un espace unique et sécurisé pour découvrir des applications. Si les revenus générés sont communiqués, les coûts de fonctionnement de l’App Store sont peu évoqués par Apple.
En 2008, c'est Steve Jobs qui présentait cet écosystème lors de la Keynote de l’App Store. C'est à revoir aujourd'hui.
À une autre époque, c’est Apple qui dénonçait le monopole d’IBM. Les temps changent et les combats ne sont pas terminés.